04/10/2009

Dirk Bogarde : remisé au placard


il est des omissions qui font vraiment chier.

dans un article des pages cinéma de Télérama (23 sept 2009), Guillemette Odicino annonce la reprise de Victim, le merveilleux film noir de Basil Dearden. Dirk Bogarde y incarne le rôle d'un avocat respectable et heureux en ménage (hétérosexuel!) rattrapé par son passé amoureux et menacé d'une terrible humiliation publique.
le film, réalisé en 1961, est un des premiers traitant de l'homosexualité à l'écran et lancera un grand débat qui jouera un rôle prépondérant dans la dépénalisation de l'homosexualité en Angleterre en 1967.
victim est un film militant. au regard du contexte anglais de l'époque et du sujet même du film : le poids et la peur du scandale quand on est au placard.
alors, c'est exaspérant de lire un article titré "le premier héros homo" et de ne pas redire que Dirk Bogarde l'était. nan, c'est sûr, c'est pas scandaleux en soi, mais quand même! un film sur la pression sociale sur les gays, avec un acteur gay (certes sorti du placard bien plus tard). mais 40 ans après, on est en droit, oui en droit de s'attendre à ce qu'une journaliste évoque l'homosexualité de Dirk Bogarde, même dans un petit article. pour le coup, il y a une vraie cohérence à le faire au vu de la sexualité de Bogarde et les films dans lesquels il a joué (Portier de nuit, Mort à venise).
voilà comment, post-mortem, on remise au placard un pédé. ça à l'air insignifiant comme ça, mais à une époque où la lutte contre l'homophobie est presque dans toutes les bouches, il est des omissions qui participent encore à invisibiliser les pédés.
Victim est dans les salles. allez le voir. réfléchissez à tout ça. surtout vous, les pédales honteuses encore au placard (oui, oui, il y en a encore). parce que c'est pas la Guillemette qui va le faire!

= la morue barbue =


PS : je ne résiste pas à l'envie de partager l'hommage amoureux fait en 99 par Louis Skorecki (Libé) à la mort de Dirk Bogarde.
"Tu n'es pas mort Dirk, tu nous pètes encore au visage, tu rigoles de tes yeux chinois, ton parfum est lourd, entêtant, capiteux. Tu es la plus belle femme du monde, un bel adolescent, un Anglais trop stylé. On suit le thé sur tes lèvres, ton thé si anglais, ton thé trop sucré. Quelques gouttes de lait tombent lentement, inexorablement, sur tes lèvres trop rouges. La mort t'embrasse sur la bouche. Tu es beau. C'est comme ça qu'on t'aime."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire